Techniques conventionnelles d'imagerie en pathologie dentaire : de l'argentique au numérique.

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Imagerie dento-maxillaire: approche radio-clinique

 Par Robert Cavézian,Gérard Pasquet,Gilbert Bel,Gilles Baller
NB : cet article est en libre accès sur le site google livre ( books.google.com) 



Longtemps négligée par les radiologistes el limitée au modeste cliché rélro-alvéolaire par les odontologistes, l'imagerie en pathologie dentaire suscite un intérêt justifié, bien que tardif.
S'il existe des techniques adaptées et spécifiques, traditionnelles à l'odonto-stomatologie (panoramique, clichés endobuccaux). l'imagerie fait de plus en plus appel aux ressources de techniques plus larges dont la vocation première n'apparaissait pas initialement être celle de la radiologie maxillo-dentaire (scanner, imagerie par résonance magnétique...)-
Aujourd'hui, la numérisation de l'image est acquise dans le monde odonto-stomatologique et favorise, par son apparente facilité et la réduction annoncée des doses, la notable diffusion d'appareils, comme le panoramique, dans les cabinets dentaires.
Si la numérisation s'est affirmée ces dernières années, elle ne remet pas en cause les techniques d'incidences pour l'imagerie dentaire pure qui ne sont pas toutes réalisables en raison des caractéristiques d'encombrement ou de taille des récepteurs.
Les caractéristiques des récepteurs numériques seront développées en fin de chapitre.

Méthodes globales

PANORAMIQUE DENTAIRE

Méthode d'exploration radiologique dentairepantomogramme (OPT), le panoramique dentaire permet de dérouler facilement, sur un seul film, au prix d"unc faible exposition, l'image des arcades, d'une articulation tcmporo-mandibulaire (ATM) à l'autre. C'est souvent par l'OPT que le radiologiste s'initie à la radiologie dentaire (lig. 2-1). L'OPT comme à diffuser dans les cabinets dentaires.
Parmi les multiples tentatives ayant précédé TOPT, on relève le Panorex. imaginé en 1957 par Hudson et Kumpala pour l'examen des recrues de TUS Air Force. C'est un appareil de maniement simple et rapide où le patient est assis face à l'opérateur. L'ensemble tube-cassette tourne autour d'un seul centre de rotation excentré. Le déplacement latéral du fauteuil à mi-course, alors que l'émission du rayonnement X est interrompue, décale le centre de rotation vers le côté opposé. Ainsi peut-on enregistrer l'un puis l'autre côté de la région maxillo-dentaire.
Il est remarquable que le programme de reconstruction 2D panoramique du logiciel Dentascan. à partir des acquisitions scanner, reprenne le nom de Panorex.
Principe de l'OPT
Précédée par la parabolographie puis la pantomo-graphie. l'orlhopantomographie réalisée par Paa-tero concrétise les travaux d'Heckmann sur la radiographie par fente des surfaces courbes. Elle associe classiquement, pour une facile compréhension, deux techniques d'imagerie :

Radiographie par fente:

Pratiquement contemporaine de la radiologie conventionnelle, elle utilise un faisceau étroit, vertical, de rayons X qui, par déplacement, parcourt la région anatomique examinée et permet d'en obtenir une image sans agrandissement, donc mesurable.

Tomographie conventionnelle:

Décrite et brevetée en 1921 par Bocage en France, réalisée en 1930 par Vatlebona en Italie, perfectionnée par Ziesdes des Plantes en Hollande, elle propose d'isoler un plan de coupe déterminé par déplacement homothétique en sens inverse du tube à rayons X et de la cassette (fig. 2-2).
Le centre du système d'homothétie est contenu dans ce plan. Il est représentatif de l'ensemble des points de la coupe. Lors du mouvement, son déplacement (comme celui de l'ensemble des points du plan) est identique à celui du film. Tous les points contenus dans le plan sont en apparence immobiles et en conséquence leur projection donne une image nette. Par contre, les points situés hors du plan sont d'autant plus déplacés, donc effacés par flou cinétique, qu'ils sont s'éloignés de ce plan.
Toutefois, le centre peut se situer en dehors du plan de coupe choisi à condition que le faisceau de rayons X soit très étroitement collimaté et que l'on ail déterminé, au préalable, très exactement la vitesse de déplacement du tube, du film ainsi que les distances respectives entre Taxe, le tube et l'objet. Ces principes applicables à une surface plane le sont également pour une surface courbe dont il faudra connaître la forme. Le modèle le plus simple est le cylindre (un seul rayon, un seul centre de rotation).
La difficulté de réalisation des appareils panoramiques lient à la forme elliptique des arcades dentaires (plusieurs rayons), de leur variabilité architecturale d"un sujet à l'autre et d'un âge de la vie à l'autre (fig. 2-3).

Évolution des appareils panoramiques:

Dans les années 50, le Finlandais Paatero a démontré que l'image d'une hémi-arcade était grandement améliorée par le décalage de Taxe de rotation vers la région molaire opposée (fig. 2-4). puis que l'utilisation de deux centres de rotation décalés de chaque côté de la mâchoire et d'un centre médian procurait une projection orthoradiale éliminant ainsi le chevauchement des dents.
Le malade étant immobile, le tube et la cassette se déplacent simultanément autour de la tête du patient : c'est le principe de l'orthopantomographc dont  dérivent tous les appareils panoramiques
(fig. 2-5).

Appareils à trois centres de rotation:

Le premier orthopantomographe fabriqué par la firme finlandaise Palomex est commercialisé par Siemens en 1961 sous le nom de OP3.
Il comporte trois centres de rotation successifs accordant une trajectoire elliptique et donne, sur un lilm 15 x 30 cm place dans une cassette courbe rigide, une image continue des mâchoires.

Appareils à centre de rotation mobile:

En 1970. General Electric met sur le marché un appareil panoramique GE 3000 appelé bientôt Panelipse. Le centre de rotation de l'appareil se déplace de façon continue. La course semi-elliptique est réglable selon la forme de l'arcade.
C'est sur ce modèle que sont conçus les panoramiques modernes.
Par la suite, des améliorations seront apportées sur la plupart des appareils proposés par la possibilité de centrage par repères lumineux et miroir, programmation informatique d'un générateur multipulsé et ralenti en regard de la colonne cervicale pour «compenser» son absorption (fig. 2-6).
Aujourd'hui. les constructeurs proposent des appareils comprenant des programmes séquentiels dont le modèle de référence est le Scanora.
Cet appareil multifonctions programmable, construit par la firme finlandaise Soredex. comprend une unité principale composée d'un tube à rayons X à anode tournante et foyer fin de 0.3 mm solidaire d'une cassette plane de format 15* 30 cm.
Parmi touts les possibilités du Scanora. le cliché panoramique, souvent préalable à d’autres modes d'imagerie offerts, présente des qualités liées à la finesse du foyer radiogène et un agrandissement constant de 1,3 qui peut être ramené à la taille réelle en cas de numérisation de l'image. La numérisation directe par capteurs ou indirecte par écrans radio-luminescents ou ERLM, (dits «plaques phosphore»), équipe la plupart des installations (paragraphe « L'Imagerie numérique : le nouvel outil »).
L'OPT isole une coupe épaisse, large en arrière (15 mm environ), étroite en avant (6 à 8 mm) épousant la forme des arcades dentaires. Cette coupe est établie à partir d'une «arcade moyenne» et peut être, sur la plupart des appareils actuels, modifiée. La rotation variable de 15 à 20 secondes permet d'obtenir sur un seul film une image continue des arcades dentaires d'une articulation temporo-mandibulairc à l'autre. De ces constatations, résultent des difficultés pratiques de réalisation.

RÉALISATION DES CLICHÉS:

La plupart des appareils développent de 50 à 80 kV pour un ampérage de 10 à 15 mA.

Mise en place du sujet:

Après avoir fait retirer les éléments métalliques gênants et générateurs de densités parasites (lunettes, prothèses amovibles, boucles d'oreilles, colliers et si possible piercings...). le sujet étant debout ou assis selon les possibilités de l'appareil, la tête est placée dans le système de contention, le plan de Francfort horizontal (fig. 2-7).
La morphologie du patient doit se conformer ou se rapprocher de la notion théorique d'arcade moyenne. A l'évidence, certains sujets s'en éloignent (mâchoires carrées, asymétries, malformations...). D'autre part, les arcades des très jeunes enfants sont trop fermées par rapport au modèle.
Les incisives sont en « bout à bout » de manière à pouvoir les placer dans la zone de netteté antérieure réduite, souvent par morsure d'une réglette rainurée.
La lordose cervicale est effacée de manière à éviter au maximum sa projection dense médiane sur le cliché (impossible chez le sujet gibbeux). la langue est collée au palais pour réduire la clarté acrique. On s'assure par le centreur vertical médian de la bonne position frontale. Des centreurs lumineux latéraux permettent de contrôler l'avancée de la tête (repères numériques affiches).
Certains appareils, comme le Scanora. admettent les patients assis face à l'opérateur. Ces conditions de confort assurent une mise en place et une surveillance plus aisée du sujet.

Temps de rotation:

Le patient reste immobile el respire calmement mais s'abstient de déglutir pendant la durée de la rotation. Cette immobilité indispensable qui dure environ 15 secondes est exceptionnellement obtenue chez le petit enfant et certains sujets handicapés. La possibilité d'asseoir le patient, au mieux face à l'opérateur, avec un moyen de contention céphalique et mentonnier efficace, facilite grandement la réalisation du cliché.

Analyse des clichés:

Ils doivent être techniquement corrects («exacts»
dit la jurisprudence...).

Qualité optique de limage:

En dehors de fautes de manipulation, le cliché obtenu doit procurer une image satisfaisante du système maxillo-dentaire.
- Densité optique homogène (suppression de la clarté aérique intrabuccale. effacement maximal de la densité rachidienne médiane) : celle condition csl difficile à obtenir chez le sujet au visage mince et anguleux, contrairement à reniant où les parties molles jugales jouent le rôle d'atténuateur.
- Symétrie droite-gauche : en dehors de toute déformation anatomique des arcades, le mauvais positionnement du sujet engendre un agrandissement relatif de l'hémi-arcade éloignée du film (fig.2-8).
- Netteté des images dentaires, en particulier dans la zone antérieure (si les incisives sont floues et petites, il faut reculer la tête, au contraire si elles sont de trop grande taille il faudra l'avancer) (fig.2-8).

Déformations de l'image:

La technique pantomographique génère des déformations verticales et horizontales entraînant des déformations dimcnsionnellcs et un agrandissement global variable avec les appareils, même si la forme générale est conservée.
Les dents apparaissent de plus en plus inclinées en dehors (disto-version coronaire) au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la ligne médiane.
Enfin, l'image d'une dent inclinée dans le sens veslibulo-lingual peut apparaître raccourcie, la dent n'étant pas abordée, en raison de sa position, perpendiculairement à son grand axe.

Lecture du cliché:

Consignée et validée par un compte rendu détaillé. c'est l'acte médical de la démarche radiologîque. Le compte rendu est une obligation et a valeur médico-légale (voir chapitre 18).
Le cliché pantomographique permet une comparaison  utile  droite-gauche. On  analysera
 successivement les dents, les organes de soutien, les structures osseuses, les cléments de voisinage sans oublier les parties molles.
Rappelons que si l'image des ATM est visible en limite de cliché, ce qui permet des dépistages aisés et utiles (asymétries morphologiques et dimensionnclles. fractures, arlhropalliies, malformations, tumeurs...), cela ne saurait dispenser leur étude morphologique et dynamique adaptée (imagerie tomographique conventionnelle ou volunuque «cône beam» ou bien encore scanner Rx.
visualisation méniscale par IRM) même si certains appareils panoramiques proposent un programme séquentiel plan sur les ATM.

Avantages et limites du cliché panoramique:

Comme l'avait fait notre maître Albert Djian pour le cliché dorso-lombo-pelvi-fémoral (DLPF), nous avons qualifié l'OPT de «cliché de débrouillage» (1978) ou de dépistage, toujours utile, quelquefois suffisant. Loin de s'opposer aux autres méthodes, il constitue 1res souvent le premier temps de l'examen radiologique dentaire.
Cette expression a fait florès, à notre grande satisfaction. Toutefois, sa variante «de débroussaillage ». que l'on rencontre parfois, nous semble, en la circonstance, un peu trop rustique...
Le cliché panoramique répond à :
- une logique anatomique. en replaçant par ses dimensions te système dentaire dans son environnement naturel (bases osseuses, cavités pneumatiques, parties molles...);
-une logique radiologique. permettant la comparaison bilatérale, toujours souhaitable;
- une logique diagnostique, privilégiant le « global » sans occulter le « particulier»;
- une logique économique par son faible coût et la richesse comme la diversité des informations qu'il procure, à condition qu'il soit techniquement correct et lu par un observateur compétent.
Les limites du panoramique soulignent ses avantages et le replacent dans un protocole cohérent d'imagerie.
Le cliché orthopantomograpkique, «tomographie
épaisse (zonographie) courbe», ne saurai! rivaliser avec la parfaite définition du film dentaire argentique ou de celle de l'image numérique in ira-buccale.
D'autre part, l'impossibilité d'une localisation topographique dans le plan horizontal pourra conduire, en complément de l'OPT. à pratiquer des
clichés endo-buccaux :
- dans un but de meilleure définition : rétro-alvéolaire long cône (fig. 2-9 a).

to be continued