Utilisation du fluor dans la prévention de la carie dentaire avant l’âge de 18 ans




Les 11  points clés :

1 .  La carie dentaire est une maladie multifactorielle faisant
intervenir des facteurs liés au sujet, à la flore
buccale et à l’alimentation ;
2 .  la prévention de la carie dentaire passe par :
3 .  l’éducation à une hygiène buccodentaire adaptée,
4 .  l’éducation à une bonne hygiène alimentaire,
5 .  une bonne utilisation des fluorures,
6 . une consultation précoce et régulière du chirurgiendentiste
;
7.  les fluorures ont démontré leur efficacité en prévention
de la carie dentaire. Leur usage, topique et/ou systémique,
doit être modulé en fonction du risque carieux ;
8 .  quel que soit le niveau de risque carieux d’un enfant, la
mesure la plus efficace de prévention des lésions carieuses
est un brossage au minimum biquotidien des dents
avec un dentifrice fluoré ayant une teneur en fluor
adaptée à l’âge. Ce brossage doit être réalisé ou assisté
par un adulte chez les enfants avant six ans ou peu
autonomes ;
9 .  les enfants à risque carieux élevé doivent bénéficier de
mesures de prévention et d’une prise en charge
spécifique par un chirurgien dentiste. Des outils
complémentaires au brossage des dents doivent être
proposés. En particulier, une supplémentation médicamenteuse
par voie orale est conseillée dès l’apparition
des premières dents (aux environs de l’âge de six mois) ;
10 .  compte tenu de la diversité des apports en fluor (eau,
sel, dentifrice ingéré. . .), toute prescription de fluor
médicamenteux (gouttes/comprimés) doit être
précédée d’un bilan personnalisé des apports journaliers
en fluor ;
11   afin d’éviter la survenue d’une fluorose dentaire, il faut
contrôler l’administration des fluorures chez les jeunes
enfants (avant six ans). Cela nécessite de réaliser périodiquement
un bilan fluoré et de restreindre l’utilisation
de fluorures systémiques à une seule source.


Introduction
En France, la santé buccodentaire de la population — et des
jeunes générations en particulier — s’est sensiblement
améliorée depuis deux décennies. Toutes les études nationales
et régionales montrent une diminution de la prévalence
de la carie dentaire. Cependant, cette tendance s’infléchit
actuellement. Des groupes à indice carieux élevé existent :
20 à 30 % des enfants concentrent 80 % des caries.
La loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé
publique avait fixé un objectif dans le domaine de la santé
buccodentaire : réduire de 30 % en cinq ans l’indice carieux
des enfants de six et 12 ans. Bien que cet objectif soit
atteint, les affections buccodentaires restent encore extrêmement
fréquentes. Elles sont inégalement réparties, touchant
préférentiellement les enfants issus de milieux
socioéconomiques défavorisés ou ayant un faible accès
aux soins.
Dans ce contexte, un plan national de prévention a été
lancé par le ministre de la Santé et des solidarités en 2005. Ce
plan comporte plusieurs mesures organisées par âge qui
visent à éviter l’apparition des lésions et à favoriser les soins
précoces : consultation de prévention à quatre mois de
grossesse et six mois après la naissance, dépistage et éducation
des enfants de quatre ans à l’école maternelle, consultation
de prévention obligatoire à six et 12 ans accompagnée
d’actions d’éducation à l’école et au collège.
Parmi les mesures de prévention de la carie, le fluor est
considéré depuis longtemps comme un agent essentiel.
Cependant, ses modalités d’administration font l’objet
de débats entre les experts au vu de toutes les données
expérimentales, cliniques et épidémiologiques actuellement
disponibles. Pour ces raisons, l’Afssaps a entrepris une nouvelle
analyse des données afin d’actualiser les précédentes
recommandations diffusées en 2002.
Mode d’action du fluor
Il importe de distinguer les effets des fluorures qui surviennent
sur les tissus dentaires lors de la formation de ces tissus
(c’est-à-dire en phase pré-éruptive), de ceux qui s’exercent
sur les tissus dentaires exposés au milieu buccal (c’est-à-dire
en phase post-éruptive).


Effet du fluor pendant la phase de formation et
de maturation pré-éruptive

Les fluorures agissent essentiellement sur le métabolisme
cellulaire des améloblastes, cellules responsables de la formation
et de la maturation initiale de l’émail. Les fluorures
exercent une action directe sur des améloblastes sécréteurs.
Cette activité est dose dépendante. Ils agissent sur le métabolisme
cellulaire (réticulum endoplasmique, croissance cellulaire,
fragmentation de l’ADN et présence de formes non
sécrétées d’anhydrase carbonique VI, etc.). Les doses toxiques
sont supérieures à celles que l’on autorise comme seuil
acceptable aux eaux de boisson.
Les fluorures interviennent successivement sur les phases
de sécrétion de la matrice amélaire (émail immature riche en
amélogénine), de réabsorption matricielle (dégradation
enzymatique de l’amélogénine) et de minéralisation, aboutissant
à une forme stable d’hydroxyapatite, carbonatée,
magnésiée, où l’on présume que le fluor s’est intégré à la
maille cristalline.
Les fluorures ont également un effet sur le métabolisme
cellulaire des odontoblastes, cellules impliquées dans la
formation de la dentine. On a noté aussi que l’administration
systémique de suppléments fluorés entraîne, selon la dose
utilisée, des effets métaboliques sur d’autres tissus et organes,
comme par exemple des dysfonctions thyroïdiennes audelà
d’un certain seuil.
Selon la dose utilisée (entre 0,03 et à 0,1 mg fluor/kg par
jour), on peut observer des perturbations métaboliques des
améloblastes et des odontoblastes. Au-delà de ces doses,
une fluorose se développe de manière dose dépendante.
L’incorporation de fluorures dans la maille apatitique
réduit la solubilité du minéral, d’où l’effet protecteur anticariogène
temporaire. L’administration de fluorures par le
biais des eaux de boisson, des aliments, des suppléments
fluorés donnés notamment aux enfants en bas âge ont changé
les données et font craindre une fluorose.
L’hypominéralisation de la dent fluorotique est essentiellement
due à la persistance de produits de dégradation de
l’amélogénine. Il est possible que les seuils de fluorose
puissent évoluer en fonction du milieu environnemental.

Effet du fluor après éruption de la dent
L’émail post-éruptif est exposé au milieu buccal donc à la
salive, aux aliments et à la plaque bactérienne. Les aliments
et liquides qui contiennent des glucides sont métabolisés
par les bactéries cariogènes par un processus de
fermentation. Les acides libérés à la surface de la dent font